Dans l’Éthique, l’œuvre maîtresse de Baruch Spinoza, le philosophe néerlandais affirme la chose suivante : « Un corps en mouvement se meut aussi longtemps qu’un autre corps ne le détermine pas au repos ; et un corps au repos, également, demeure au repos aussi longtemps qu’un autre ne le détermine pas au mouvement » (E2L3C). Ce que décrit Spinoza, et qu’on appelle aujourd’hui « principe d’inertie », est un des fondements de sa physique. Parallèlement à cette énonciation du principe d’inertie, la troisième partie de l’Éthique introduit un second concept, le conatus, qui servira de fondement à la physiologie, à la théorie des passions ainsi qu’à la théorie politique de Spinoza. Selon ce concept, « chaque chose, autant qu’il est en elle, s’efforce [conatur] de persévérer dans son être » (E3P6).
Or, malgré une ressemblance manifeste entre les deux concepts, aucun des deux énoncés ne fait de renvoi direct ou indirect à l’autre. Dans une œuvre qui fourmille de renvoi, cette absence de liens explicitement établis semble bien être une exception. C’est cette anomalie qui provoque la question qui oriente notre recherche : « Quelle est la nature de la relation entre le concept d’inertie et le concept de conatus chez Spinoza ? »
Pour répondre à cette question qui engage l’ensemble de l’œuvre du philosophe, nous utilisons une méthode à la fois historique, herméneutique et exégétique. Grâce à cette méthode, nous déterminons que le conatus possède deux aspects complémentaires et indissociables : un aspect mécaniste de conservation de l’être ainsi qu’un principe dynamique d’expression de la puissance. En concevant l’inertie comme une des manifestations du conatus, on démontre d’une façon jusqu’alors inédite la très grande cohérence du système spinozien.
Thèse de doctorat en philosophie soutenue le 11 septembre 2019
Membres du jury
Mme Syliane Charles, directrice de recherche
Professeure au Département de philosophie, UQTR
M. Mogens Laerke, codirecteur de recherche
Professeur à l’ENS Lyon
M. Christian Leduc, évaluateur
Professeur à l’Université de Montréal
M. Tudor-Mihai Baetu, évaluateur interne
Professeur au Département de philosophie, UQTR
M. Lorenzo Vinciguerra, évaluateur externe
Professeur à l’Université de Picardie Jules Verne