Chaque année, des milliers de personnes s’engagent dans le processus de création d’entreprise au Québec et une partie importante de celles-ci ne réussissent pas à rendre leur entreprise pérenne. Face à ce constat, Étienne St-Jean, professeur à l’École de gestion de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), Maripier Tremblay, professeure à l’Université Laval et Ismaïl Elalaoui, doctorant à l’UQTR, en collaboration avec l’École des entrepreneurs du Québec et le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec, ont mené une enquête visant à mettre en lumière les défis des entrepreneurs émergents du Québec.
Six grands défis
L’équipe de recherche, ainsi que plusieurs ressources, ont mobilisé différentes méthodes pour produire un outil permettant de connaître et de mesurer ces défis. Pour ce faire, ils ont d’abord parcouru le Québec en organisant des groupes de discussion issus de la communauté entrepreneuriale et de partenaires. Ils ont ensuite demandé à 77 entrepreneurs, femmes et hommes, de classer ces différents défis en groupes. Leurs analyses ont fait ressortir six grands défis. Afin de les valider auprès d’un échantillon plus large et représentatif, l’équipe a mobilisé les partenaires et les réseaux sociaux pour joindre 226 entrepreneurs dans un pré-test, puis mobiliser un échantillon de 389 entrepreneurs issus du panel web de Léger 360.
Cet outil, testé auprès de gens d’affaires, a permis de confirmer l’existence de six grands défis auxquels font face les entrepreneurs émergents du Québec : la gestion du développement de l’entreprise, la gestion financière et légale, la gestion de la santé psychologique, la gestion de la carrière entrepreneuriale, la gestion des technologies numériques et la gestion du capital humain.
Leurs résultats indiquent aussi que le premier défi auquel ils font face est la gestion financière et légale suivi par la gestion de la santé psychologique. Ce dernier, particulièrement d’actualité depuis la pandémie de Covid-19, s’avère un élément important pour lequel plusieurs écosystèmes entrepreneuriaux se sont mobilisés dans les derniers mois. L’équipe de recherche s’engage d’ailleurs à étudier et développer différentes initiatives dans ce sens dans les prochains mois.
Au niveau des contextes pouvant influencer les défis, l’équipe souligne que la perception de ces défis change selon certaines caractéristiques, comme la taille de l’entreprise, le fait d’avoir des enfants ou l’accès à certaines ressources. En effet, on constate que plus le nombre d’employés augmente, plus les défis sont jugés importants, en particulier celui qui concerne la gestion du capital humain.
Plus de défis pour les hommes
Par rapport au genre, les hommes affirment rencontrer plus de défis que les femmes, surtout au niveau de la gestion du capital humain, de la gestion de la carrière entrepreneuriale, de la gestion du développement de l’entreprise et de la gestion des technologies numériques. Selon les membres de l’équipe de recherche, ces résultats paraissent logiques, du fait que dans leur échantillon, les entreprises dirigées par des hommes ont plus de personnel que les entreprises dirigées par des femmes.
Le fait d’avoir un enfant (ou plus) augmente aussi la perception des défis chez les hommes. Ceux ayant des enfants semblent rencontrer des défis plus importants au niveau de la gestion du développement de l’entreprise, de la gestion de la santé psychologique, de la gestion de la carrière entrepreneuriale, de la gestion des technologies numériques et de la gestion du capital humain, comparativement aux hommes sans enfant. Du côté des femmes, aucune différence n’est constatée entre le fait d’avoir ou non un enfant.
Accès aux ressources et défis
L’équipe constate que d’avoir accès à du personnel de qualité disponible, lorsque l’entreprise en a besoin, contribue à diminuer les défis de la gestion du capital humain, tout en favorisant le développement de l’entreprise, la santé psychologique et, enfin, la carrière entrepreneuriale. Dans le contexte de la pénurie de personnel dans plusieurs secteurs d’activités, ce résultat confirme l’importance de cet enjeu pour les entrepreneurs émergents.
D’un point de vue des écosystèmes entrepreneuriaux, les résultats de leur enquête révèlent aussi que le fait d’avoir une rétroaction de qualité sur le projet facilite la gestion du développement de l’entreprise, la gestion de la santé psychologique et la gestion de la carrière entrepreneuriale. Cette rétroaction de qualité est généralement offerte gratuitement ou à coût très faible par les différents organismes de développement économique, les structures d’incubation, les ressources du Réseau Mentorat ou les structures universitaires comme le Centre d’entrepreneuriat et d’innovation Desjardins de l’UQTR.
Enfin, l’accès à de la formation utile et de qualité réduit les défis de la gestion du capital humain, alors qu’avoir un soutien émotionnel de qualité contribue à diminuer les défis de la gestion de la santé psychologique. Ces résultats mettent l’emphase sur l’importance des organismes de formation tels l’École des entrepreneurs du Québec, l’un des partenaires de la recherche, qui en plus d’offrir une variété de formations à faible coût pour la communauté entrepreneuriale, a mis sur pied plusieurs activités d’échanges, ce qui est susceptible de briser l’isolement et de maintenir un bien-être élevé auprès de cette clientèle.
Rapport complet
L’équipe rend disponible le rapport complet dans lequel se trouve une liste de 24 questions permettant d’identifier l’ampleur de ces six défis auprès des personnes en affaires. Cet outil peut servir de tableau de bord, pour leur proposer un plan de formation et de développement professionnel, ou simplement permettre une prise de conscience sur l’ensemble des dimensions importantes sur lesquelles elles devront demeurer vigilantes dans l’évolution de leurs projets.
Collaborations :
Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec