Avez-vous l’impression de vivre parfois dans le dessin animé Les douze travaux d’Astérix ? Vous cherchez désespérément le formulaire A38 et êtes renvoyé d’un service à un autre ? Vous avez déjà attendu en file beaucoup trop de temps ? On vous a déjà remis un produit ou un service erroné? Vous avez déjà constaté un fouillis administratif innommable dans une organisation ? Vous avez déjà rempli un formulaire à la main, en trois copies ?
Je ne vous surprendrai peut-être pas en disant que le monde est rempli de mauvaises façons de faire, héritées d’une autre époque ou complexifiées inutilement. La plupart d’entre nous avons des anecdotes à raconter à propos d’organisations déficientes, autant dans les entreprises privées que les organisations publiques. Mauvaise qualité, insatisfaction du client, temps perdu, délai d’attente, demande à refaire, travail à recommencer ou erreur informatique : tant d’exemples où les pratiques mériteraient d’être changées et améliorées.
Constater ces situations est une chose, mais les régler en est une autre. Règle générale, plus une organisation est grande, plus les façons de faire sont complexes et les solutions difficiles à implanter. Une entreprise de deux ou trois employés peut corriger une erreur ou une mauvaise information en quelques secondes. Mais on fait quoi pour une entreprise de 50, 100 ou 1 000 personnes ? En fait, améliorer les pratiques de travail d’employés est une des choses les plus difficiles à faire. Selon certains chercheurs[1], entre 70 et 80 % des changements organisationnels échoueraient ou n’atteindraient pas leurs objectifs. Ouch !
Un échec biologique ?
Les raisons de ces échecs sont très variées. Le domaine de recherche de la résistance au changement est vaste et propose de nombreux modèles[2] pour expliquer pourquoi l’humain, dans son extraordinaire potentiel de créativité et d’adaptabilité, se refuse souvent à changer et à s’améliorer. Évidemment, on peut argumenter que de nombreux changements sont mauvais et qu’il est nécessaire de refuser de s’y plier. Il est aussi possible d’expliquer la résistance du point de vue biologique. Dans son livre Le pouvoir des habitudes, Duhigg avance que l’humain a besoin de limiter les changements dans son environnement pour une raison simple : économiser de l’énergie ! Ce serait donc une question de survie ancrée dans notre ADN d’humain que de nous créer des habitudes et limiter le changement pour conserver notre énergie à d’autres fins. C’est effectivement plus reposant pour notre cerveau de répéter un geste acquis qu’en apprendre un nouveau. Il serait donc inscrit en nous de résister à changer, même s’il est favorable. Comment alors vaincre ce facteur biologique ? Serait-ce seulement possible ?
L’humain adaptatif
Bon, ne soyons pas si cyniques. Nous sommes capables de changer et de nous améliorer. L’humain peut être biologiquement paresseux (pas vous, lecteurs : les autres…), mais il est aussi réputé pour s’adapter à son milieu. C’est ce qui lui aurait permis de survivre à tous les changements dans son environnement. D’ailleurs, on peut souligner un tas d’exemples où des organisations et leurs employés ont fait des changements qui ont amélioré un peu ou beaucoup des aspects de leur travail.
Pensons entre autres à l’accélération du passage aux douanes canadiennes à l’aéroport Pierre-Elliott Trudeau[3], l’utilisation croissante de la prise de rendez-vous par Internet dans les garages automobiles et les cliniques médicales (avec rappels automatisés par texto), et la réduction du temps d’attente pour les patients au service de prélèvement sanguin en Mauricie.
Une amélioration à la fois
Une chance, tout n’est pas perdu. Mais ce n’est pas en changeant tout à la fois qu’on réussira à être meilleurs. En fait, nous n’avons généralement pas la possibilité de tout mettre à terre et de recommencer. C’est souvent plutôt en réalisant une amélioration à la fois qu’on y arrivera, et en recommençant souvent.
Le but de cette chronique sera de vous présenter, sur une base régulière, des organisations qui s’améliorent. Que ce soit en lien avec la qualité de leurs produits ou services, la satisfaction à la clientèle ou celle de leurs employés, le temps de travail ou les coûts engendrés, il sera question des bons coups, des innovations ou des changements réalisés par des gens, patrons et employés, qui travaillent ensemble à s’améliorer. Ces améliorations proviendront de tous les domaines et, souhaitons-le, pourront inspirer les gens d’ici.
Qui sait, si on réécrivait aujourd’hui Les douze travaux d’Astérix, le formulaire A38 serait disponible sur téléphone intelligent, envoyé directement dans l’infonuagique et traité en quelques secondes par un employé à une centaine de kilomètres…
Si vous avez des idées de sujets ou des bons coups à souligner, écrivez-moi à : pascal.forget@uqtr.ca.
Références
[1] Par exemple : Bareil (2010), Higgs et Rowland (2005), Kotter (1995) et Miller (2002).
[2] Par exemple : Lewin (1951), Kotter (1996), Bareil et Savoie (1999), Lawrence(1969), Argryis et Schön (1978), Piderit (2000) et Oreg (2003, 2006, 2008).
[3] http://www.lapresse.ca/actualites/grand-montreal/201709/22/01-5135999-pierre-elliott-trudeau-lattente-moyenne-a-la-douane-baisse-a-10-minutes.php