Le sport est un vecteur d’identité, un motif de fierté pour les peuples. Qu’on pense à la relation qu’entretiennent les Québécois avec leur équipe de hockey fétiche, les Canadiens de Montréal. « Mais nous oublions souvent que le sport est un héritage venu d’Angleterre, même s’il a subi différentes transformations au contact de la réalité canadienne », affirme Laurent Turcot, professeur au Département des sciences humaines de l’UQTR.
Dans sa conception moderne, le sport se développe à partir du XVIIIe siècle en Angleterre. Il y a bien eu les tournois médiévaux du Moyen-Âge et les Jeux olympiques en Grèce antique, mais c’est vraiment en terre anglaise qu’on introduit les sports de compétition, comme la boxe, le golf et le criquet, qui visent à démarquer les meilleurs. « Lorsque le Québec est conquis par les Britanniques, ceux-ci introduisent une culture sportive qui est étrangère aux nobles français. L’Angleterre a formé ses étudiants dans les écoles publiques au XIXe siècle et, en bonne conquérante, la mère patrie envoie ces jeunes-là prendre en charge les pays du Commonwealth, dont le Canada », explique le chercheur au Centre interuniversitaire d’études québécoises (CIEQ).
Les jeunes et les militaires britanniques exportent ainsi leurs sports, qui vont se transformer au contact de l’hiver canadien. Laurent Turcot précise : « Des sports d’hiver tels que la raquette et le patinage deviennent au cœur de notre identité sportive. Et il y a bien évidemment le hockey qui, par toute une série de transformations et d’influences, va se mettre en place à la fin du XIXe siècle. »
La culture britannique s’adapte également à celle des Amérindiens; l’exemple le plus frappant est la crosse, un sport très populaire à l’époque de la conquête. « Il faut voir le sport comme un lieu de métissage à travers lequel se crée une forme de culture canadienne. Aujourd’hui, la crosse a disparu du paysage sportif au Canada au profit du hockey », souligne le professeur de l’UQTR, ajoutant que « c’est en 1875 qu’un étudiant de l’Université McGill a pour la première fois structuré les règles du hockey, qui deviendra notre sport national ».
Porteur d’identité, le sport doit aussi être vu comme un facteur de cohésion sociale. « Le sport, et plus particulièrement le hockey, devient un élément intégrateur au sein de la Confédération, permettant à tout le monde de se rassembler et d’échanger, indépendamment de l’origine et de la classe sociale. Si, pour certains, le hockey révèle aujourd’hui une certaine rivalité entre le Québec et le reste du Canada, à l’époque il s’agissait d’un important marqueur de l’unité canadienne et de cohésion à l’intérieur de la Confédération », rappelle Laurent Turcot.