Souvent confrontées à la peur, l’angoisse et aux risques de blessures physiques et psychologiques, les victimes de conjoints violents peuvent compter sur le Carrefour sécurité en violence conjugale (CSVC), un outil que se sont appropriés plus d’une douzaine de partenaires, dont des intervenants communautaires et des services policiers dans le but de leur venir en aide efficacement.
Instauré en 2012, le Carrefour sécurité en violence conjugale est un groupe de travail ayant mis en place différentes stratégies afin d’augmenter la concertation entre les nombreux intervenants œuvrant en violence conjugale. Il permet d’évaluer le niveau de sécurité des femmes qui vivent ou qui pourraient vivre des situations de harcèlement et de violence. Les facteurs de risques sont analysés et l’information est ensuite partagée entre les différents partenaires afin de protéger les victimes et leurs proches qui pourraient également être en danger.
À titre d’exemple, un partenaire du CSVC peut recevoir une information à l’effet qu’un homme sort de prison et qu’il menacerait de s’en prendre à sa femme à son retour à la maison. La femme serait tout de suite prise en charge par les intervenants, les policiers seraient avertis de surveiller l’homme en question et les avocats informeraient l’agresseur des conséquences auxquelles il s’expose s’il ne se conforme pas à ses conditions de remise en liberté.
« Nos données démontrent que la concertation de tous les partenaires concernés est un élément clé, autant dans l’amélioration de la sécurité des femmes victimes de violence familiale quand dans la mesure des risques auxquels elles sont exposées. Une organisation ne peut à elle seule répondre à tous les besoins. Cette évaluation et ce partage rapide d’information entre tous les intervenants permettent donc un meilleur encadrement », explique Synda Ben Affana, professeure au Département de lettres et communication sociale de l’UQTR et collaboratrice au CSVC.
Développé et expérimenté de 2008 à 2012 dans le cadre d’un projet pilote dont les activités se sont déroulées dans le district judiciaire de Saint-Maurice, en Mauricie, le CSVC a été soutenu financièrement par le ministère de la Justice du Québec (par le biais du Fonds d’aide aux victimes d’actes criminels). Il a par ailleurs bénéficié de l’expertise de l’UQTR et du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale. Enfin, il résulte de la mobilisation d’une vingtaine d’organisations issues des secteurs d’intervention psychosociale, policière, judiciaire et correctionnelle.
La sécurité, une question de perception
Selon Synda Ben Affana, l’intervention du CSVC auprès des personnes vivant dans un environnement violent est d’une grande importance, puisque les femmes victimes de violence conjugale ne peuvent pas évaluer objectivement le risque auquel elles font face quotidiennement.
« Dénoncer un conjoint violent est un acte complexe. Souvent, les femmes demandent de l’aide seulement après avoir vécu un épisode de violence sexuelle ou physique. Elles n’ont pas su reconnaître les risques qui démontraient qu’elles étaient en danger. La violence psychologique est particulièrement difficile à déceler pour certaines femmes », explique la chercheuse.
Pour d’autres, c’est la confiance envers les intervenants sociaux et les policiers qui pose problème.
« Si une femme ne fait pas confiance aux policiers ou aux intervenants, elle ne dénoncera pas son conjoint et elle ne demandera pas d’aide. Grâce au CSVC, les personnes comprennent que les organismes et les policiers travaillent ensemble pour les protéger. C’est toute une équipe qui collabore pour s’assurer que les personnes sont protégées. »
En souvenir d’une victime
Questionnée sur ce qui l’a menée à travailler auprès des victimes de violence, Synda Ben Affana se remémore le vécu d’une amie qui a été sous l’emprise d’un mari violent. Séparée de son bourreau après seulement trois mois de mariage, elle avait ensuite mis plus de cinq ans avant de pouvoir se confier à propos de ses souffrances.
« Ça m’a choquée! Savoir qu’une amie proche s’est fait violenter au point de ne pas pouvoir se confier, de ne pas pouvoir dénoncer et demander de l’aide me révolte encore aujourd’hui. En tant que chercheuse en communication, j’ai également toujours eu de l’intérêt pour les sujets difficiles à communiquer, les tabous et les non-dits. C’est donc probablement la combinaison du souvenir de mon amie et ma passion pour les communications qui m’a amenée à travailler avec les victimes d’actes violents afin qu’ils dénoncent », conclut la chercheuse.
En matière de violence conjugale, l’amélioration de la sécurité des victimes est prioritaire. Pour demander l’aide du CSVC, il suffit de consulter le www.csvc.ca.