Avoir une voix, c’est se faire entendre. C’est agir sur le monde, pour faire bouger les choses. Bien que puissante, la voix n’est pas seulement l’apanage des grands orateurs. Sans le savoir, les personnes plus discrètes la portent aussi en elles. À l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), la communauté étudiante comporte son lot de membres réservés. On les retrouve au fond des salles de classe, silencieux, se faisant à peine remarquer. Or, l’UQTR est un formidable milieu de proximité, où plusieurs trouvent la confiance d’explorer leur voix. D’ailleurs, c’est au campus de Québec que Josyanne Duchesne, étudiante à la maîtrise en psychoéducation, a trouvé la sienne.
D’entrée de jeu, l’approche de l’étudiante vient défaire une idée préconçue. Posée et calme, l’attitude de Josyanne démontre qu’on peut très bien être engagée sans scander dans un porte-voix. De toute manière, la principale intéressée avoue qu’elle n’a pas une personnalité très sonore à la base.
« Quand je suis arrivée à l’Université, j’étais assez introvertie : pendant les cours, je m’assoyais à l’arrière, et je ne parlais pas beaucoup. Pendant ma première année de baccalauréat, c’est à ça que mon quotidien ressemblait ! À ma deuxième année, par contre, les choses ont commencé à changer. Un de mes amis de l’Association étudiante m’a demandé de l’aider à organiser des activités. J’ai alors découvert que j’avais beaucoup d’intérêt pour les rôles d’animation. Et par la force des choses, je suis devenue une référence pour les étudiants du campus. Je trouvais ça merveilleux de pouvoir les aider et répondre à leurs questions », indique Josyanne.
« À ma troisième année, j’ai profité de la création du comité socio-environnement pour m’impliquer encore davantage. De mon point de vue, ce comité avait le potentiel de répondre à énormément de besoins. Il pouvait aussi bien canaliser l’activisme de la communauté étudiante qu’améliorer l’environnement du campus. Je me suis donc lancée sans hésiter », poursuit-elle.
Avec l’expérience, Josyanne développe graduellement une façon bien à elle de revendiquer. Ses différentes fonctions au sein de l’Association étudiante l’amènent à rencontrer Marie-Christine Fortin, la coordonnatrice du campus de Québec. Bien affirmée, l’étudiante lui parle avec passion des enjeux qui lui tiennent à cœur.
« Josyanne et moi nous connaissons depuis un peu plus de deux ans. Pour moi, c’est une étudiante extraordinaire ! J’admire son dévouement envers la communauté étudiante : elle veille au bien-être de ses membres, et développe activement leur sentiment d’appartenance. Sa façon de présenter ses idées fait en sorte qu’on a envie d’embarquer avec elle. Ses propositions sont bien amenées, réfléchies, et franchement difficiles à contredire ! Elle a compris qu’un environnement universitaire, c’est plus qu’un lieu d’études. C’est un milieu de vie, qu’on peut construire et adapter pour répondre à des besoins », témoigne Mme Fortin.
Pour trouver comment améliorer le campus, Josyanne n’a pas besoin de chercher bien loin. La plupart des idées proviennent de ses collègues d’études, qui lui font part de leurs préoccupations. Si ses initiatives prennent racine dans la communauté, l’étudiante a quand même le mérite de faire avancer les dossiers qu’elle porte.
« Par exemple, on m’a exprimé le besoin d’avoir un espace de travaux et d’études pour les personnes qui passent la journée au campus. Alors, en collaboration avec Marie-Christine, nous avons fait aménager un local à cette fin. Cet ajout a permis à la communauté d’habiter un peu plus le campus de Québec, tout en améliorant la cohésion et les liens entre les différents membres », illustre Josyanne.
« Sur une autre note, il y a aussi la question de la rémunération des stages. Comme cet enjeu déborde nos murs, nous agissons au sein d’un plus grand mouvement, le Collectif « Un salaire pour tous les stagiaires ». Au cours de la dernière année, nous avons mis cette cause en évidence, à travers notamment des manifestations. Plusieurs députés de l’Assemblée nationale ont même pris position en faveur du mouvement. Le mouvement commence à rallier beaucoup de monde, alors j’ai espoir que nous parvenions à des avancées concrètes », ajoute-t-elle.
Parmi ses autres engagements incontournables, Josyanne siège au comité de lutte contre les violences à caractère sexuel (VACS). Ses démarches visent à assurer la tenue d’activités étudiantes sécuritaires, dans un environnement sain et respectueux. Si elle a réussi à obtenir la formation de témoins actifs, elle travaille également à mettre en place des leçons d’autodéfense pour ceux et celles qui en ressentiraient le besoin. Jusqu’à récemment, elle siégeait aussi au comité équité, diversité et inclusion (EDI), qui vise à rendre le parcours universitaire plus inclusif et équitable, dans une perspective d’accès aux études supérieures qui favorise la diversité. Dans tous les cas, la discrétion de l’étudiante n’enlève rien à son efficacité.
« On remarque souvent les personnes flamboyantes, qui saisissent toutes les occasions d’être entendues. De son côté, Josyanne est tout aussi impliquée, mais c’est dans l’ombre qu’elle fait une différence. Elle n’est pas du genre à poser de grands gestes d’éclat, mais ses nombreuses initiatives lui ont permis de réaliser de grandes choses ! Au fil de ses engagements, elle a raffiné ses techniques d’approche, fait évoluer son discours et enrichi sa manière d’aborder l’implication en général. Son parcours a quelque chose d’inspirant, parce qu’il démontre qu’en portant les préoccupations de la communauté étudiante, c’est tout à fait possible d’actualiser des projets », note Mme Fortin.
En plus de la fierté qu’elle retire du travail accompli, l’étudiante remarque que sa trajectoire lui a fait faire de grands pas dans sa vie personnelle.
« Le fait de m’impliquer m’a changée sur plusieurs aspects. Par rapport à avant, je suis beaucoup plus extravertie, et davantage tournée vers les gens. D’ailleurs, mes amis me disent que je ne suis plus du tout la même personne ! Ça a complètement changé ma vie sociale, personnelle et professionnelle », atteste Josyanne.
« Je constate que tout cela est possible parce que notre milieu nous soutient dans nos démarches. Quand on nous encourage à nous exprimer, à nommer nos besoins et à agir en conséquence, c’est motivant de s’investir », souligne-t-elle du même souffle.
Découvrir une vocation
À voir comment Josyanne se dévoue pour les autres, on pourrait croire qu’elle se destinait naturellement à la relation d’aide. Toutefois, la réalité n’est pas aussi simple. Issue d’un parcours collégial en sciences de la nature, elle présente un fort intérêt pour la résolution de problèmes. Elle sait aussi qu’elle veut améliorer la qualité de vie des gens, mais ignore encore quelle forme pourrait prendre cet accompagnement.
« En toute honnêteté, c’est la veille de mon inscription à l’université que j’ai découvert la psychoéducation. Initialement, c’est en ergothérapie que je voulais étudier ! Mais comme je n’ai pas été acceptée dans ce programme, j’ai décidé de faire mon baccalauréat en psychoéducation au campus de Québec. Au final, je suis vraiment contente que ça se soit déroulé ainsi, parce que j’ai découvert une véritable passion pour la relation d’aide », raconte-t-elle.
Originaire d’Alma au Lac-Saint-Jean, l’étudiante accorde aussi beaucoup d’importance au milieu dans lequel elle souhaite évoluer. En ce sens, elle demande l’avis de personnes ayant déjà fréquenté l’UQTR par le passé. Celles-ci lui vantent la proximité avec le personnel enseignant, les liens serrés qui unissent la communauté et l’atmosphère chaleureuse qui anime le campus. Ces arguments se confirment à son arrivée : elle rencontre des gens qui lui ressemblent, partageant à la fois ses valeurs et ses traits de caractère. Dans cet environnement où tout le monde se connaît, elle forge rapidement plusieurs amitiés durables.
Transposer ses acquis
Aujourd’hui en deuxième année de maîtrise, Josyanne partage son temps entre son essai et son stage. Pour le volet recherche, elle travaille avec la professeure Jessica Pearson sur les difficultés d’adaptation chez les enfants de 6 à 12 ans faisant de la dysphorie de genre. En parallèle, elle effectue son stage au Centre de pédiatrie sociale de Lévis.
« Ma clientèle, c’est vraiment la famille. C’est la ligne directrice de tout ce qui m’intéresse dans le domaine de la psychoéducation. Que ce soit l’intervention par la nature, la prévention des agressions sexuelles chez les enfants ou l’approche de pédiatrie sociale, c’est l’aspect familial que je trouve le plus enrichissant », explique Josyanne.
En fait, l’étudiante a tellement la piqûre qu’au terme de ses études, elle caresse l’idée d’ouvrir une clinique de pédiatrie sociale dans sa région natale.
« Mon plan, c’est de retourner au Lac-Saint-Jean pour me rapprocher de ma famille. J’aimerais vraiment implanter une clinique à Alma ou dans les environs, parce que c’est quelque chose qui manque. Ça répondrait à tellement de besoins ! Je concède que c’est un gros projet, et que ça risque de se faire sur le long terme, mais si l’opportunité se présente, c’est vraiment quelque chose que j’aimerais faire », conclut-elle.