Le monde va vite. Plus vite que jamais auparavant. En un claquement de doigts, le travail s’accumule. L’information change. Les coûts explosent. Cette course folle est un marathon ; aucune pitié pour ceux qui ne suivent pas le rythme. Pourtant, tous ne sont pas en mesure de le courir. On l’oublie facilement, mais le genre humain comprend aussi des personnes différentes. Si elles peinent à trouver leur place dans une société qui valorise le faire et l’avoir, l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) leur offre un milieu où elles peuvent être en toute simplicité : son campus de Québec.

Martin Caouette, professeur au Département de psychoéducation et travail social de l’UQTR et titulaire de la Chaire autodétermination et handicap. (Photo: Michel Lamy, UQTR)
En temps normal, l’agora du campus s’anime au gré de la vie étudiante. Or, le va-et-vient laisse croire qu’une journée spéciale s’y prépare. Alors que l’École d’automne de la Chaire autodétermination et handicap bat son plein, le personnel achève l’organisation d’une rencontre fort attendue.
« Nous accueillons cette semaine une vingtaine de professionnels qui travaillent dans le secteur du handicap en France. À travers des conférences et des formations, cette délégation vient approfondir ses connaissances sur l’autodétermination », explique Martin Caouette, professeur au Département de psychoéducation et travail social de l’UQTR et titulaire de la Chaire.
« Nous voulons leur faire vivre une approche expérientielle. Aujourd’hui, nous avons invité le personnel de l’organisme Laura Lémerveil, qui va non seulement présenter son approche d’intervention, mais aussi être accompagné de personnes qui reçoivent des services de sa part. Ce sont des personnes polyhandicapées, dont certaines sont en fauteuil roulant, ont une déficience intellectuelle et sont non verbales. Afin de créer un moment de rencontre, nous organisons un tournoi de boccia (un sport semblable à la pétanque), qui permettra aux professionnels français d’observer la mise en œuvre de certains principes d’accompagnement », ajoute-t-il.
Le groupe en question, que l’organisme surnomme « les Artisans », arrive graduellement. Chaque personne est accompagnée ; aucune ne pourrait se passer de ce soutien. À mesure que les nouveaux venus font leur entrée, le portrait se précise. Dans cette confrontation, il faudra tout donner.
Après les présentations d’office, les Artisans s’exécutent. Lancer la balle est ardu. Utiliser la rampe d’assistance l’est peut-être plus encore. Mais lorsqu’ils y parviennent, aucun honneur, aucun titre mondial, n’égalerait leur fierté.
Du côté de la délégation française, le respect accordé au rythme des personnes surprend quelque peu. La logique ne réside pas dans l’accomplissement de la tâche, mais plutôt dans la considération. On prend tout le temps nécessaire pour s’assurer que la personne a bien compris, et on fait preuve de patience pour la laisser s’exprimer. On reste ainsi centré sur l’essentiel, en offrant un soutien qui respecte sa dignité.
Une inspiration

Vincent Gaudreault, étudiant à la maîtrise en psychoéducation au campus de l’UQTR à Québec. (Photo: Michel Lamy, UQTR)
Cette activité est une première pour le campus de Québec. Heureusement, les membres étudiants de la Chaire sont présents pour soutenir la logistique et l’animation. Parmi eux, Vincent Gaudreault mise sur son expérience passée avec les Artisans.
« Laura Lémerveil a une approche distinctive, que j’ai eu la chance d’apprivoiser à la fin de mon baccalauréat. Mon stage au sein de cet organisme a été une véritable immersion, qui a beaucoup influencé mon identité professionnelle. Encore aujourd’hui, je m’efforce de garder la même vision en progressant dans ma formation », avance l’étudiant à la maîtrise en psychoéducation.
« J’ai vraiment eu un coup de cœur pour cette clientèle ! D’ailleurs, mon parcours me permet de m’impliquer dans des activités sociales et des projets liés au handicap. Par exemple, il y a une course durant l’été pour amasser des fonds, à laquelle je participe avec l’équipe de la Chaire. Ce genre d’initiative crée des ponts entre la recherche et le milieu communautaire », renchérit Vincent.
À cet égard, l’étudiant consacre aussi son mémoire à une question incontournable pour les organismes : celle des milieux résidentiels. Il cherche ainsi à déterminer quelles caractéristiques d’aménagement favorisent l’autodétermination des personnes ayant une déficience intellectuelle, tout en leur permettant de mieux participer à la société. Ses travaux devraient déboucher sur l’élaboration d’un guide pratique destiné aux développeurs résidentiels.
« Quand j’ai terminé mon baccalauréat, j’ai décidé d’aller sur le marché du travail pour acquérir plus d’expérience terrain. Ce passage en emploi a été riche, au point où j’ai eu envie de formaliser mes nouvelles connaissances à travers une maîtrise. Le choix de l’UQTR était évident en raison de la proximité avec les professeurs. J’ai beaucoup de chance de travailler avec Martin, il comprend que l’attention et la considération sont de puissants vecteurs de changement pour les personnes handicapées », indique Vincent.
Rêver mieux
Pour en revenir à l’École d’automne, le professeur Caouette estime que les visiteurs français ont acquis bien plus qu’un savoir. Il voit en eux la volonté de faire une différence, à leur échelle du moins.
« Grâce à leurs apprentissages, les membres de la délégation deviennent en quelque sorte des ambassadeurs de l’autodétermination. En les outillant par rapport aux interventions, ils peuvent à leur tour sensibiliser leurs équipes sur le vieux continent. Jusqu’à présent, c’est environ une centaine d’ambassadeurs que nous avons formés », souligne-t-il.
La communauté étudiante des programmes de psychoéducation, quant à elle, se positionne comme une force d’inclusion dans un monde où il peut être difficile de s’ouvrir à l’autre.
« La formation en psychoéducation fait de nous de meilleures personnes. Elle nous permet d’acquérir un savoir-être qui nous distingue dans la suite de notre vie personnelle et professionnelle. Elle fait également de nous des personnes engagées dans leur communauté, qui font des gestes simples pour aider leur prochain », conclut Vincent.
Le campus de l’UQTR à Québec ouvrira ses portes le samedi 22 novembre, de 10 h à 13 h. Une occasion unique de découverte pour les personnes qui voudraient y entreprendre un parcours d’études !
L’École d’automne de la Chaire autodétermination et handicap est organisée en partenariat avec le Service de la formation continue de l’UQTR et Campus formation, avec la collaboration du GAPAS.
