Dans un contexte québécois marqué par des transitions économiques, sociales et environnementales majeures, la question du passage de l’innovation à l’industrialisation revêt une importance stratégique. L’École Internationale d’été 2025, organisée par l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) en collaboration avec la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO), a permis d’explorer cette thématique à travers une série de conférences et d’activités immersives. Cette réflexion s’inscrit dans une démarche de synthèse critique des contenus abordés, en lien avec les enjeux contemporains de la gestion, de la communication organisationnelle et du développement durable.

Elie Michel Guerrier, étudiant à la maîtrise en administration des affaires (MBA), concentration gestion de la communication de l’UQTR.
Cet article – Courant d’idées – est rédigé par Elie Michel Guerrier, étudiant à la maîtrise en administration des affaires (MBA), concentration gestion de la communication de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).
Responsabilité sociale et innovation : vers une convergence des finalités
La responsabilité sociale des entreprises (RSE), telle que présentée par le professeur François Labelle, constitue un cadre incontournable pour penser l’innovation dans une perspective durable. Dans le contexte québécois, où les entreprises sont soumises à des pressions institutionnelles croissantes, la prise en compte du triple bilan (économique, social, environnemental) devient une exigence normative. L’intégration des Objectifs de développement durable (ODD) dans les stratégies d’innovation permet de dépasser une logique purement financière pour embrasser une vision systémique de la performance.

L’économie circulaire comme levier de transformation
Les conférences de la professeure Hajer Tebini ont mis en lumière les limites du modèle économique linéaire et les opportunités offertes par l’économie circulaire. Ce paradigme, fondé sur la réduction, la réutilisation et la valorisation des ressources, s’inscrit dans une dynamique de rupture avec les pratiques industrielles traditionnelles. Dans le contexte québécois, où les politiques publiques encouragent la transition écologique, l’économie circulaire apparaît comme un vecteur d’innovation organisationnelle et territoriale. Les sept piliers identifiés par l’ADEME offrent un cadre structurant pour repenser les modèles d’affaires et les chaînes de valeur.
Changement organisationnel et communication stratégique
L’innovation ne peut se déployer sans une transformation des structures et des cultures organisationnelles. La professeure Fatima-Azzahra Lahrizi a présenté les modèles de Kotter (1995) et Lewin (1947) comme outils d’analyse du changement, en soulignant l’importance du leadership, de la communication transparente et de la participation active des parties prenantes. Dans une perspective de gestion de la communication, ces éléments sont essentiels pour favoriser l’adhésion au changement et prévenir les résistances. Le modèle de culture organisationnelle de Schein permet de comprendre les dynamiques profondes qui influencent les comportements et les représentations au sein des organisations québécoises.

Industrialisation de l’innovation : vers des écosystèmes collaboratifs
La conférence du professeur Hani Sarkis et l’intervention de M. Clément Villemont ont permis d’aborder la question de l’industrialisation de l’innovation à travers une approche multiniveau : miso (individuel), méso (organisationnel) et macro (systémique). L’exemple de la Vallée de la transition énergétique et les visites à Shawinigan (IABET, DigiHub de Shawinigan) illustrent la mise en place d’écosystèmes d’innovation favorisant la collaboration entre acteurs publics, privés et académiques. Ces initiatives témoignent de la volonté du Québec de positionner l’innovation comme moteur de développement industriel durable.
Conclusion et recommandations
La trajectoire allant de l’innovation à l’industrialisation ne peut être envisagée sans une remise en question des modèles traditionnels. Les interventions des experts et professeurs ayant animé cette académie d’été ont souligné que l’industrialisation durable repose sur l’intégration cohérente de plusieurs leviers stratégiques : la responsabilité sociale des entreprises (RSE), l’économie circulaire, et les stratégies de changement organisationnel.
Dans le contexte québécois, cette transition appelle à une mobilisation accrue des acteurs de la gestion et de la communication, capables de penser de manière systémique et d’agir en cohérence avec les enjeux contemporains. Les recommandations formulées par les intervenants convergent vers plusieurs axes d’action :
- Renforcer les partenariats intersectoriels entre institutions académiques, entreprises et gouvernements pour créer des écosystèmes d’innovation territoriaux, comme ceux observés à Shawinigan (DigiHub, IABET) et à Drummondville (CNIMI).
- Favoriser l’adoption de l’économie circulaire dans les modèles d’affaires, en intégrant les principes d’écoconception, d’approvisionnement durable et de valorisation des ressources dès les premières étapes de l’innovation.
- Développer une culture organisationnelle ouverte au changement, en s’appuyant sur des leviers tels que le leadership transformationnel, la communication transparente et la participation active des employés.
- Outiller les futurs gestionnaires à travers des formations immersives et interdisciplinaires, leur permettant de comprendre les enjeux de l’innovation non seulement sur le plan technologique, mais aussi social et environnemental.
Les participants à cette activité en ressortent mieux préparés, conscients des défis à relever et porteurs de solutions concrètes. Ils sont désormais en mesure d’apporter une valeur ajoutée significative aux structures qu’ils intégreront, en contribuant à une industrialisation plus responsable, inclusive et durable.

