Créée par la nouvelle équipe réunissant Jean-François Côté, chercheur-créateur à l’UQTR, Simon Barnabé, chercheur à l’UQTR, conseiller scientifique en chef de la Ville de Victoriaville et titulaire de la Chaire de recherche municipale pour les villes durables et Martin Beauregard, chercheur-créateur à l’UQAT, ce nouveau laboratoire mise sur la valorisation et l’impression 3D des sédiments dragués du réservoir Beaudet en pratiques sculpturale et installative.
Une première activité officielle du nouveau regroupement, le « SYMBIOSE – Laboratoire intersectoriel en art, technologie et environnement », a eu lieu le 14 octobre dernier au réservoir Beaudet, à Victoriaville, un événement orchestré par la Chaire de recherche municipale pour les villes durables. Étaient réunis, une douzaine de chercheurs et étudiants interdisciplinaires de l’UQTR, l’UQAT, l’UQAM et l’Université Laval ainsi que des acteurs locaux dont des représentants du Bureau du développement durable de la Ville de Victoriaville et de la Cité de l’innovation circulaire et durable. Un riche espace de dialogue entre les arts, les sciences naturelles et sociales, le génie et l’écoconception ont jeté les bases de futures collaborations et innovations.
Ce projet s’ancre dans le contexte de l’Escouade VictEau, créée en 2021 et soutenue par CentrEau, avec mission d’accompagner et d’aviser la Ville de Victoriaville dans ses démarches autour des enjeux de qualité et de quantité d’eau du réservoir. En fait, un projet de restauration avait été lancé par la ville en 2021 pour assurer la pérennité de l’approvisionnement en eau et l’amélioration des loisirs face à une accumulation de sédiments menaçant sa principale réserve d’eau. En mobilisant les acteurs locaux et de la recherche ainsi que les connaissances pour des avis éclairés par la science, l’Escouade VictEau a piloté une série d’ateliers qui avaient d’ailleurs mené à cibler deux grands axes de recherche-action et d’intervention dont la gestion et la valorisation des sédiments dragués où le laboratoire SYMBIOSE s’inscrit particulièrement.
L’art comme outil de transitions écologique, sociale et culturelle
Les domaines de recherche et de recherche-création liés à l’art environnemental, à la fabrication additive (impression 3D) et au recyclage des matières résiduelles sont au cœur de la mission du laboratoire; celle-ci vise à relever le défi des transitions écologique et numérique en développant de nouveaux savoirs, en soutenant la formation des étudiantes et étudiants aux trois cycles d’études, ainsi que la mobilisation des connaissances entre les milieux universitaires, industriel et culturel. « Dans la conjoncture actuelle où la société vit de nombreuses transitions, il est important d’explorer le rôle de la recherche-création comme moteur de la transition écologique et sociale, à travers des pratiques de recyclage et de revalorisation de résidus industriels forestiers et miniers, ainsi que de sédiments dragués », mentionne le professeur Simon Barnabé.
Afin de répondre à ce défi majeur, ce nouveau laboratoire propose une synergie novatrice entre les domaines des arts, de l’environnement et des technologies numériques, dans le but de favoriser le développement d’une pensée écologique globalisante allant à la rencontre des milieux universitaires, de la culture et de l’industrie. « En mobilisant des approches à la fois expérimentales et sensibles, les projets qui seront développés transcenderont les frontières traditionnelles entre recherche fondamentale, innovation technologique et pratique artistique », témoigne le professeur Jean-François Côté. Dans ce contexte, nous explorons l’impression 3D qui offre une approche novatrice pour donner une seconde vie aux sédiments dragués du réservoir Beaudet, en les intégrant dans la création d’écomatériaux et d’œuvres inédites, ce qui permettrait de transformer des ressources locales en créations artistiques et durables.
Une nouvelle approche, de nouveaux matériaux, de nouvelles avenues
« Le réservoir Beaudet est parmi les quelques milieux d’eau douce dragués d’importance au Québec, avec la particularité d’avoir des sédiments propres – conséquemment un meilleur potentiel de valorisation – comparativement aux sédiments côtiers et portuaires en général assez contaminés », informe Nicholas Fecteau, coordonnateur de terrain de la Chaire de recherche municipale. La portion fine des sédiments du bassin a une consistance visqueuse et une granulométrie suffisamment fine pour être employée comme additif à l’argile de céramique et de procédé d’impression 3D d’extrusion de matière. Pour la Cité de l’innovation circulaire et durable qui œuvre entre autres à trouver des débouchés pour des résidus, ce sont des gisements qui méritent d’impliquer la recherche interdisciplinaire et d’impliquer les acteurs locaux autant pour étudier leurs caractéristiques physiques que leur employabilité. Par exemple, la fabrication d’un matériau composite intégrant les sédiments dragués à une base d’argile pourrait servir dans de multiples usages en arts, en design, ou encore, dans le domaine de la construction, et ce notamment dans la confection de poterie ou de brique (l’argile de céramique étant composée de minéraux tels que la kaolinite, l’illite et la montmorillonite et pouvant inclure les silicates d’aluminium, du quartz, de feldspath et de mica). Dans le même sens, l’impression 3D d’argile représente une avenue prometteuse pour réutiliser les matières sédimentaires dans l’écoconception et l’optimisation des procédés de fabrication numérique; elle permettrait de créer des formes complexes à petite et grande échelle, comme des bijoux, du mobilier urbain ou des structures d’habitation.
Pour la Ville de Victoriaville, « ce sont des avenues jusqu’alors inexplorées et au potentiel de rejoindre les citoyens », affirme Carline Ghazal, conseillère stratégique au Bureau du développement durable à la Ville de Victoriaville. Une future zone récréative destinée aux citoyens est d’ailleurs prévue pour recouvrir la zone de dépôt de sédiments. Il est « possible de rêver y voir des œuvres fabriquées à partir de sédiments locaux racontant une histoire locale de sédimentation, d’accumulation d’événements, de mémoires et de vestiges qui a façonné le milieu au fil du temps », évoque Nicholas Fecteau.
Encore une fois, l’intersectorielle et l’interdisciplinaire dans la course pour les transitions
Ancrée dans une approche intersectorielle et interdisciplinaire, cette démarche « mobilise les savoirs croisés des arts, du génie, de l’écoconception, des sciences naturelles et des acteurs locaux pour transformer des matières résiduelles en matériaux expressifs, porteurs de mémoire et de sens » soutient le professeur Martin Beauregard. Avec ce nouveau laboratoire interdisciplinaire, nous comptons montrer comment la création peut devenir un véritable outil de connaissance, capable de transformer des matières résiduelles, issues des secteurs forestier, minier ou municipal, en vecteurs de sens, d’utilité, de mémoire et de régénération des milieux.
Pour plus d’information
Nicholas Fecteau
Coordonnateur de terrain de la Chaire de recherche municipale pour les villes durables et agent structurant de recherche
Coordonnateur de la Table des conseillères et conseillers scientifiques en chef municipaux du Québec
Chercheur-collaborateur à l’I2E3
Courriel : nicholas.fecteau@uqtr.ca
Téléphone : (819) 960-1139
