Et si vous laissiez votre intuition guider vos mouvements ? C’est le principe central du mouvement intuitif, une nouvelle approche qui se distingue par son adaptation aux besoins physiques et émotionnels de chaque individu. Pour Myriam Lacoursière, étudiante à la maîtrise en sciences de l’activité physique à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), « cette approche repose sur l’écoute des signaux corporels et la prise en compte des émotions, offrant une alternative à la culture actuelle de la performance autant qu’à l’enjeu de la sédentarité, notamment chez les adolescentes ».
La jeune chercheuse ajoute que l’approche intuitive combine la motivation, l’estime de soi et le respect de son corps avec la personnalisation de l’activité physique : « C’est une approche adaptative, dans le sens où chaque personne est encouragée à ajuster la durée, l’intensité et la fréquence de ses activités physiques en fonction de ses besoins du moment, avec un respect profond pour son corps et ses limites. »
L’objectif est de restaurer un équilibre souvent perdu entre sédentarité et exercice excessif, avec la finalité de renouer avec les raisons saines de bouger. En ce sens, le mouvement intuitif répond notamment à des problématiques spécifiques, comme la sédentarité, le surentraînement ou encore les troubles alimentaires.
Définir scientifiquement le mouvement intuitif
Le mouvement intuitif est une toute nouvelle approche dans le domaine de l’activité physique qui demande d’être formalisée, et c’est la tâche à laquelle s’est attelée Myriam dans son projet de maîtrise dirigé par les professeures Sacha Rose Stoloff et Stéphanie Girard du Département des sciences de l’activité physique de l’UQTR.
S’inspirant de l’alimentation intuitive, une méthode validée scientifiquement depuis une vingtaine d’années, la jeune femme travaille à créer un cadre qui rendra l’approche par mouvement intuitif uniformisée, valide et applicable à un large public. L’étude qu’elle a menée vise d’abord à standardiser le concept de « mouvement intuitif » et à identifier les attributs en lien avec l’activité physique.
« Décortiquer le concept en attributs permet d’en extraire le sens et de poser les bases pour développer des interventions appuyées sur cette approche, ou encore pour guider les professionnels de la santé dans son application. Bien que théorique, ce type d’étude est essentiel pour ancrer un concept dans la littérature scientifique, éviter les mauvaises associations et aussi faciliter sa diffusion et son adoption dans le domaine », soutient Myriam.
Les piliers du mouvement intuitif
Le mouvement intuitif repose sur quatre piliers principaux qui structurent la pratique de l’activité physique et en définissent l’essence.
D’abord, la régulation des émotions à travers l’activité physique appuie le fait qu’il ne s’agit pas seulement de bouger pour rester en forme, mais d’utiliser le mouvement pour gérer le stress, l’anxiété ou les pensées négatives tout en y trouvant du plaisir.
Ensuite, la confiance en son corps permet de valoriser l’écoute de soi et de ses signaux corporels pour choisir le type, l’intensité et la durée de l’activité physique. Contrairement aux régimes d’entraînement rigides, cela permet d’adapter sa pratique à ce que l’on ressent réellement.
La flexibilité du mouvement intuitif encourage à ajuster son activité en fonction de ses besoins et préférences. Par exemple, il est possible de choisir un type d’exercice différent chaque jour, selon son humeur ou ses sensations. Cette flexibilité favorise une réponse affective plus positive et un engagement à long terme.
Enfin, la bienveillance envers soi incite à être attentif aux signes de fatigue, de douleur ou de surmenage. En respectant les limites de son corps, la personne évite les blessures et développe une relation plus harmonieuse avec soi-même. La bienveillance permet aussi d’adopter une attitude non critique envers ses performances.
Créer un dispositif d’accompagnement
Sur le plan clinique, Myriam met en place une stratégie d’intervention basée sur dix principes, par exemple approcher l’activité physique avec curiosité, accepter et faire la paix avec son corps et modifier le mouvement pour soi. Elle souhaite créer un outil d’accompagnement en ligne qui, un peu comme un journal intime, permettra de découvrir les dix principes à travers autant de semaines, de noter ses impressions et d’inciter à l’introspection à travers le plaisir de bouger.
Une solution aux enjeux psychologiques des adolescentes
Chez les adolescentes, le principal public cible, l’activité physique est souvent associée à une pression sociale et esthétique. Le mouvement intuitif propose une solution à cette problématique en se concentrant sur l’introspection : « Cette approche pousse les jeunes filles à réfléchir à leurs émotions, à leurs sensations et à leurs attentes vis-à-vis de l’exercice. Cela les aide à se détacher des standards irréalistes imposés par la société et à retrouver un lien sain avec leur corps », explique la jeune chercheuse. Selon elle, les interventions actuelles destinées aux adolescentes prennent rarement en compte ces aspects psychologiques.
Le rejet des standards esthétiques et de la performance
L’un des moteurs du mouvement intuitif est son rejet de la « culture du régime » et du culte de la minceur, alors que l’activité physique est souvent perçue comme un moyen de sculpter son corps pour répondre à des standards esthétiques. « Nous cherchons à déconstruire cette perspective en rappelant que l’objectif principal de l’exercice devrait être le bien-être, et non la conformité à des normes sociales basées sur la superficialité », affirme-t-elle.
« On se fait plus de mal que de bien en se comparant aux autres, à leur apparence ou à leurs performances. Chacun doit trouver son propre chemin pour se sentir bien dans son corps », souligne Myriam avant de résumer : « Le mouvement intuitif encourage donc les personnes à se concentrer sur les vraies raisons équilibrées et épanouissantes de bouger. Pour se sentir bien, s’amuser et être en harmonie avec son corps. »