Défenseur invétéré de la culture québécoise, rappeur à la prose entraînante et historien à ses heures, Biz, alias Sébastien Fréchette, a ajouté, depuis quelques années déjà, une corde littéraire à son arc. C’est à travers des œuvres telles que Dérive, Naufrage, ainsi que La chaleur des mammifères que cet artiste aux multiples talents égaye les lecteurs québécois du bout de sa plume.
Épopée aux confins des trois rivières
Fier diplômé du programme d’études en loisir, culture et tourisme de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), Biz s’avoue lui-même changé depuis son passage dans l’établissement trifluvien. « C’est le fruit du hasard qui m’a mené à l’UQTR, comme ben du monde, et je n’ai absolument rien regretté de mes cinq années ici », confie l’artiste. Il poursuit : « Trois-Rivières fait partie de mon identité, je vois l’UQTR un peu comme l’utérus m’ayant vu naître et m’ayant alimenté ». De nombreuses rencontres, notamment avec le regretté Michel Bellefleur, ainsi qu’avec Michel De La Durantaye, tous deux ayant œuvré à titre de professeurs au Département de loisir, culture et tourisme, auront influencé ses perceptions sociales. « Michel Bellefleur, grand philosophe, je dirais même extraordinaire philosophe. Quand il était à son bureau, je m’en allais là, et là, là c’était Socrate et son élève, un à un, et là on avançait », décrit l’artiste.
Il continue en précisant que ces cinq années auront grandement influencé sa future carrière. En effet, c’est à la suite d’un entretien avec un agent de recherche du ministère de la Culture à Trois-Rivières qu’il a été contraint d’abandonner ses ambitions liées à la recherche. « D’ici dix ans mon p’tit gars, penses-y même pas » s’est vu répondre le jeune récréologue. Les postes en recherche dans le domaine de la culture étaient rares, voire même inexistants, à cette époque. Les baby-boomers occupant la majeure partie de ceux-ci. « Lorsqu’ils partaient à la retraite, ils revenaient comme consultants », expose l’artiste. C’est de cette prémisse que le jeune Biz prit la décision d’évoluer dans un domaine où les boomers étaient absents: le rap !
C’est donc dire que Sébastien Fréchette, sans cette malencontreuse situation, serait possiblement professeur aujourd’hui. « Ça me fait frémir de penser que je pourrais être dans un ministère avec une cravate, j’en tremble. Je l’ai ce côté rationnel, l’amour de la recherche, de l’intellect, mais il y aurait tellement un côté de moi qui ne serait pas accompli », insiste le diplômé de l’UQTR.
Une carrière de perdue, dix autres de retrouvées
Depuis près de 20 ans maintenant, celui-ci tente de modifier la perception des Québécois et des Québécoises face à de nombreux enjeux sociaux, notamment l’identité québécoise. « Est-ce que l’art peut changer le monde ? La réponse est oui. Pas le monde à 7 milliards d’êtres humains, mais du monde, une personne, deux personnes, trois personnes. Mais c’est avec des citoyens engagés et conscientisés qu’on crée une société », exprime l’auteur.
Après avoir fait vibrer musicalement le Québec pendant près de dix ans, Biz se concentre désormais sur sa carrière d’auteur. Ses derniers ouvrages, Cadillac et C’est Flavie, lui permettent d’élargir son champ de compétences littéraires. En effet, C’est Flavie, illustré par sa propre fille, Alice Fréchette âgée de 8 ans, est un recueil proposant dix courtes histoires flirtant entre l’innocence de l’enfance et la maturité de l’âge adulte. « Une approche qui saura plaire, j’ose l’espérer, tant aux parents qu’aux enfants », indique son auteur.
Place au grand écran
Ce pilier de la culture québécoise a également vu l’une de ses œuvres littéraires transcender le grand écran grâce à la sortie du film La chute de Sparte. Ce film, réalisé en collaboration avec Tristan Dubois, met de l’avant une perspective trop souvent marginalisée, soit l’adolescence. « Ça nous aura pris cinq dépôts à la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), avant que notre film soit financé … Mais l’expérience, à part la galère du financement, ç’a été très enrichissant », explique-t-il. Au cours des prochaines semaines, Biz, accompagné de M. Dubois et Lévi Doré, acteur principal de la distribution, s’envoleront en direction de la Suisse pour faire la promotion du film dans des écoles et des festivals.
Malgré un emploi du temps considérable, ce passionné d’histoire est également à la veille de présenter le scénario de son prochain long métrage, Mort-Terrain. « Nous avons un producteur intéressé, il faut simplement que nous lui présentions une version de scénario qui ne devrait pas tarder… d’ici Noël préférablement », explique Sébastien, en ajoutant : « Il y aura d’autres défis à travers ce film-là. C’est un film nordique, un film avec des Amérindiens, avec de l’équipement lourd, des mines, des motoneiges… Un tournage nordique là, c’est les caméras en hiver qui gèlent, des équipes qui doivent travailler moins longtemps, ça coûte plus cher évidemment ». Néanmoins, le scénariste reste optimiste et voit de très bon augure sa prochaine œuvre cinématographique.
Qu’il soit donc rappeur, compositeur, récréologue ou écrivain, Biz est d’abord et avant tout un grand humaniste qui a à cœur le bien-être de sa culture et de ses origines. Contrairement à ce que son titre Langage-toi prétend, le verbe faire ne semble pas se perdre à travers son œuvre. Souhaitons donc, si l’inaction est une aire de repos, qu’il ne s’y arrête pas trop souvent.